Projet de commune nouvelle entre Pierrefitte et Saint-Denis : interview

Pierrefitte-sur-Seine et Saint-Denis collaborent depuis de nombreuses années et les deux villes partagent un bassin de vie commun, leurs habitants naissent dans le même hôpital, prennent le même tramway T5, vont dans les mêmes parcs, la même Université, font leurs courses sur le même marché… Ce projet de création d’une commune nouvelle propose d’aller plus loin et d’inscrire les deux villes dans un projet de territoire fort et ambitieux.

Unies, les villes seront plus fortes !

Pour faire face aux nombreux défis (baisse des dotations de l’État, crise énergétique, inflation exceptionnelle,…), l’union des deux communes permettra de créer une centralité de près de 150 000 habitants (2e ville de la région Île-de-France après Paris) et ainsi d’avoir davantage de poids auprès des différents interlocuteurs institutionnels ou économiques.

Mais surtout, cette commune nouvelle permettrait de renforcer le service public, son efficacité et sa diversité, tout en conservant les identités des deux villes.

Découvrez le détail du projet dans une interview du Maire de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, et du Maire de Pierrefitte, Michel Fourcade accordée au Parisien 93.

Interview des Maires au Parisien 93 du 5 avril 2023 :

Les maires (PS) de Saint-Denis et de Pierrefitte-sur-Seine, Mathieu Hanotin et Michel Fourcade (ici, dans la rue Guynemer, située à cheval entre leurs deux villes). LP/A.L.

Le rendez-vous a été donné ce mercredi midi dans le bâtiment des Archives nationales de France, à la frontière entre les deux communes qui, demain, pourraient n’en former qu’une. Après l’annonce surprise du projet visant à unir leurs deux villes, les maires de Saint-Denis et de Pierrefitte-sur-Seine, Mathieu Hanotin (PS) et Michel Fourcade (PS), ont accepté de répondre à nos questions.

Un vœu annonçant leur volonté de rapprochement doit être adopté lors de deux conseils municipaux extraordinaires qui auront lieu le même jour, le jeudi 20 avril. Le vote visant à créer cette commune nouvelle, qui gardera le nom de Saint-Denis, devrait intervenir à l’été 2024, pour une mise en commun des services municipaux au plus tard début 2025.

Mathieu Hanotin deviendra alors maire de la commune nouvelle et Michel Fourcade son premier adjoint, tout en restant maire de la commune déléguée de Pierrefitte. Un conseil municipal comprenant les élus des deux villes fonctionnera jusqu’aux prochaines élections municipales, en 2026.

L’annonce de ce futur mariage a créé la surprise générale. Pourquoi ce projet de fusion ?

Michel Fourcade. D’abord, les deux villes ont une longue histoire commune, elles étaient d’ailleurs unies jusqu’à la fin du Moyen Âge. Et puis, nous avons surtout un bassin de vie commun, avec le tramway (le T5), un marché de Saint-Denis où beaucoup de nos habitants se rendent…

Mathieu Hanotin. Nos communes n’ont aucune frontière physique. Il y a des rues de Saint-Denis qui rentrent dans Pierrefitte, et inversement. La séparation administrative n’avait finalement pas beaucoup de sens. Et c’est surtout un choix qui va nous permettre de porter un projet politique commun. Unis, on sera plus forts, on ira beaucoup plus vite que chacun de notre côté et on est convaincus que l’on pourra rendre un meilleur service aux habitants.

M.F. Pour nous, passer d’une ville de 35 000 habitants à 150 000, cela change tout. Pierrefitte pourra se développer bien plus vite et nous pèserons beaucoup plus auprès de l’État, de la Métropole, de la région…

Qu’est-ce que cette union apporterait à vos habitants ?

M.F. Cela leur permettra d’utiliser les équipements municipaux de Saint-Denis, ses cinq centres de vacances par exemple. Nous pourrons aussi bénéficier de sa foncière commerce pour développer notre centre-ville. Et aujourd’hui, d’un point de vue budgétaire, on a des limites que Saint-Denis va nous permettre de dépasser.

M.H. La ville du XXIe siècle doit répondre à de nombreux défis, dont l’urgence climatique. Face à la raréfaction de l’argent public, en devenant la deuxième commune d’Île-de-France, notre voix comptera beaucoup plus. Il est vrai que l’urgence se fait plus ressentir aujourd’hui à Pierrefitte qu’à Saint-Denis, car elle subit pleinement l’inflation. Ce qui a contraint la ville à augmenter sa taxe foncière de 8,8 % cette année…

M.F. (Il coupe) Et ces 8,8 % vont servir, à peine, à payer les surcoûts de l’énergie.

M.H. A l’échelle d’une ville comme Saint-Denis, on a réussi à optimiser notre fonctionnement, et donc à ne pas toucher aux impôts cette année. En revanche, l’union — qui nous oblige à aligner nos taux — permettra, dès quatre ans, de faire baisser la fiscalité de 20 % à Pierrefitte. Mais nos habitants n’en feront pas les frais. L’opportunité, elle est pour les deux villes. D’ici trois ou quatre ans, c’est un projet qui nous permettra d’investir davantage.

Et quels changements peut-on attendre dès les premiers jours de la fusion ?

M.H. Très concrètement, demain, les Pierrefittois pourront bénéficier de la cantine gratuite que nous avons mise en place à l’école. Sur l’habitat indigne — l’une de nos priorités communes —, nous avons aujourd’hui 36 agents qui s’en occupent à Saint-Denis contre trois à Pierrefitte. Demain, on sera évidemment plus efficace à 40. C’est le même raisonnement pour la police municipale : aujourd’hui, il y a une vingtaine d’agents à Pierrefitte qui travaillent jusqu’à 1 heure du matin. Nous en avons 100, 24 heures sur 24. L’impact de notre union sera donc très important. Demain, à Pierrefitte, la police municipale fonctionnera tous les jours, 24 heures sur 24, avec une capacité d’intervention décuplée.

La ville de Pierrefitte ne risque-t-elle pas de disparaître ?

M.F. Non, elle restera Pierrefitte, une commune déléguée intégrée à la commune nouvelle.

M.H. Nous respectons totalement l’identité de la ville. Elle aura le même périmètre qu’actuellement, les habitants conserveront leur adresse. La seule différence, c’est que sur les panneaux, il y aura écrit : « Pierrefitte, commune déléguée de Saint-Denis. »

Depuis ce mardi, de nombreux élus, dont les députés du territoire Stéphane Peu (PCF) et Éric Coquerel (LFI), ont rappelé que ce projet n’était pas dans vos programmes…

M.H. Le concept du mandat impératif n’existe pas : on a le droit de confronter notre programme à la réalité. C’est pour ça que la population nous choisit : le programme sert à donner une direction, une philosophie d’action. Et on sera jugé sur les résultats. Est-ce que la ville sera demain plus sûre ? Plus propre ?

M.F. On veut améliorer la situation. Et parfois, cela passe par des chemins que l’on n’avait pas envisagés.

Dans l’opposition, on exige que les habitants soient interrogés, voire qu’un référendum soit organisé…

M.H. Il fallait bien aller voir les habitants avec une proposition pour concerter. On n’est pas sur la ligne d’arrivée, mais sur le point de départ. Préparer cet acte de naissance va prendre une grosse année. On va se donner le temps de la pédagogie, de la discussion. En revanche, aucune des communes qui ont fusionné ces dernières années n’a eu recours au référendum. On est sur un sujet qui ne peut pas se décider par un vote pour ou contre.

D’autres élus ont critiqué une « manœuvre électorale » avant les municipales de 2026…

M.H. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne pourrait pas lancer ce projet si on n’avait pas une vision politique partagée. Mais les habitants de cette commune nouvelle garderont leur pouvoir de décision. En 2026, ils devront voter et, si les élus ont fait du mauvais travail, généralement ils n’hésitent pas. Le vrai référendum, il sera là.

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